Agriculture

Les ventes de pesticides et de glyphosate ont explosé en France

Agriculture

par Sophie Chapelle

Une étude pilotée sous l’égide du ministère de la Transition écologique et solidaire révèle une hausse des ventes d’insecticides, fongicides et herbicides depuis 10 ans en France. Un bilan alarmant.

Entre 2009 et 2018, les ventes d’insecticides ont été multipliées par 3,5 ! Celles des fongicides ont progressé de 41 %, tandis que celles des herbicides ont augmenté de 23 %. Ces données sont issues d’une étude publiée en mai 2020 par le Commissariat général au développement durable, rattaché au ministère de la Transition écologique et solidaire [1]. Cette explosion des ventes de pesticides révèle l’échec cuisant du plan Écophyto lancé en 2008, qui vise une réduction de l’utilisation des pesticides. La moyenne des quantités de substances actives vendues a augmenté de 22 % entre 2009-2011 et 2016-2018. Toujours selon cette étude, près d’un quart des substances achetées sont particulièrement préoccupantes pour la santé humaine.

En 2018, la quantité totale de substances actives vendues en France s’élève à 85 900 tonnes (t), contre 71 200 t en 2017. Source : BNV-D

La Gironde, premier acheteur de pesticides

Entre 2016 et 2018, vingt départements ont totalisé plus de la moitié de la quantité de pesticides achetée. Avec plus de 3600 tonnes de ces toxiques vendues en 2018, la Gironde arrive en tête. Viennent ensuite la Marne, le Pas-de-Calais, la Somme et le Gard.

La superficie agricole et la nature des cultures contribueraient largement, selon l’étude, à expliquer les disparités territoriales observées. La Marne est ainsi le département qui compte la plus grande surface agricole utile avec près de 555 000 hectares, soit plus du double de la moyenne nationale. La vigne – notamment pour le champagne – y est prépondérante. La Somme est le premier département producteur de pommes de terre, qui, quand elle est intensive, requiert des épandages fréquents. Les surfaces de cultures permanentes sont également dominantes en Gironde et dans le Gard.

Échec complet sur le glyphosate

Les achats de glyphosate, dont la France a annoncé vouloir se passer d’ici à 2022, ont augmenté de 25 % sur dix ans. Le glyphosate demeure l’herbicide le plus vendu au niveau national parmi les 122 substances actives à usage herbicide. Sa consommation en France a même augmenté entre 2017 et 2018, passant de 8800 tonnes à 9700 tonnes.

Alors que les ventes d’herbicides, en moyenne triennale, augmentent de 14 % entre 2009-2011 et 2016-2018 (période la plus longue disponible), celles de glyphosate progressent de 25 %. Source : BNV-D

Plus de la moitié des achats de glyphosate se concentrent dans un quart des départements. La dose utilisée – la quantité de glyphosate rapporté au nombre d’hectares agricoles – a également augmenté. La Gironde est, là-encore, le département qui a acheté le plus de glyphosate par hectare, suivi par l’Hérault, le Vaucluse, le Gard et le Var. La Charente-Maritime est le département totalisant la plus grande quantité de glyphosate achetée. L’épidémie de cancers est loin d’être terminée...

Seule source d’optimisme, l’effet de la loi « Labbé » qui interdit, depuis janvier 2017, l’usage des pesticides pour l’entretien des espaces verts, des voiries, des promenades et des forêts, ouverts ou accessibles au public. Pour les particuliers, cette interdiction est effective depuis le 1er janvier 2019. Les ventes de produits référencés « emploi autorisé dans les jardins – EAJ » ont ainsi diminué de plus de la moitié entre 2013 et 2018 (936 tonnes en 2018, contre 1200 tonnes en 2017). L’étude souligne néanmoins que 98 produits portant la mention « EAJ », et donc autorisés à la pulvérisation dans les jardins, contient du glyphosate.

Sophie Chapelle

Photo : CC Aqua Mechanical

Notes

[1Cet état des lieux annuel des ventes et des achats de produits phytopharmaceutiques et de glyphosate en France est établi d’après les données de la Banque nationale des ventes réalisées par les distributeurs de produits phytopharmaceutiques (BNV-D). Seules les personnes justifiant de leur statut d’utilisateur professionnel et disposant d’un certificat d’aptitude (Certiphyto) peuvent acheter des produits « non EAJ », qui ne sont pas destinés à l’emploi dans les jardins. Consulter l’étude.