Mouvements sociaux

Ces victoires collectives, c’est grâce à vous que nous pouvons les raconter

Mouvements sociaux

par Sophie Chapelle

L’année 2020, aussi dure est-elle, a été marquée par des victoires, parfois au terme de mois et d’années de luttes. A Basta!, nous voulons leur donner l’écho qu’elles méritent, face à un rouleau compresseur médiatique qui tend à écraser nos espoirs et notre énergie.

En cette exécrable fin d’année 2020, il y a quand même quelques petites victoires à fêter pour celles et ceux qui tentent de prendre soin de l’avenir de la planète. Dix années de combat ont été nécessaires pour venir à bout d’un symbole de l’agriculture totalement industrialisée et hors-sol : la ferme-usine « des 1000 vaches » en Picardie a annoncé qu’elle ne produira plus de lait à compter du 1er janvier 2021. La persévérance d’une association locale a eu raison de ce projet sur lequel Basta! vous alertait dès 2012.

Fin de partie également pour un autre symbole, celui d’un tourisme dévoreur d’espaces naturels et générateur d’emplois de mauvaise qualité : le groupe Pierre et Vacances et son Center Parks à Roybon, en Isère, a annoncé l’abandon de son projet, bloqué par plusieurs procédures judiciaires, et par l’installation d’une ZAD. Comme à Notre-Dame-des-Landes, la complémentarité des modes d’actions se révèle gagnante.

Une autre ZAD a d’ailleurs vu le jour en Loire-Atlantique pour empêcher la bétonisation de 110 hectares d’espace naturel sur l’estuaire de la Loire. Implantés depuis le 1er septembre sur le site du Carnet, les personnes mobilisées viennent d’obtenir le report d’un an des travaux afin qu’un nouvel inventaire de la faune et de la flore soit réalisé. Une « respiration », pas une victoire, qui souligne l’importance de l’alerte. Nous vous en reparlerons dans les jours qui viennent.

Dans le Rhône et la Loire, là encore, une mobilisation au long cours a été nécessaire pour enterrer définitivement le projet d’autoroute A45 entre Lyon et Saint-Etienne. Grâce à l’action de collectifs locaux, une gabegie d’argent public et la destructions de terres nourricières sont évités.

Sur le front social, plusieurs mobilisations enregistrent aussi quelques victoires

Un autre géant, dans le secteur du ciment cette fois, a aussi dû reculer en 2020 : le groupe Calcia a abandonné son projet de carrières au sein du Parc naturel régional du Vexin (Yvelines). Ce projet remontant à deux décennies était ressorti des cartons en 2014 pour, officiellement, répondre aux besoins en ciment des nombreux chantiers du Grand-Paris. Un argument que les opposants battaient déjà en brèche lorsque nous les avions rencontrés au début de leur combat. Dans les Côtes d’Armor, celles et ceux qui s’opposent depuis dix ans à l’extraction de sable dans la baie de Lannion ont aussi célébré leur victoire définitive.

Sur le front social, plusieurs mobilisations enregistrent aussi quelques victoires. C’est le cas face au projet d’accord de libéralisation du commerce entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay). Le 9 novembre, sous la pression de l’opinion publique, les ministres des 27 États-membres n’ont pas pu avaliser cet accord. « L’heure n’est plus celle d’une mondialisation qui fait de l’intérêt des multinationales un objectif supérieur à la protection de la planète, aux droits sociaux et aux droits des populations », pouviez-vous lire sur Basta!. En France, la très contestée réforme des retraites a été mise, pour l’instant, entre parenthèse. Le mouvement social du début d’année n’y est pas pour rien. Et le combat en cours pour empêcher les mesures liberticides du gouvernement – notamment sa loi de sécurité globale – qui menacent l’ensemble des futures mobilisations, est loin d’être achevé.

Ces quelques victoires, définitives ou temporaires, sont le fruit de dynamiques collectives, de modes d’actions variés (occupations, manifestations, batailles juridiques...), d’alliances entre associations, syndicats et élus, et d’une grande persévérance loin de l’indignation fugace favorisée par les réseaux sociaux.

Ces mouvements, et les victoires qu’ils décrochent, c’est grâce à vous que nous pouvons les raconter.

Sophie Chapelle